dimanche 28 août 2011

Du nom de Pilat : 1ère partie : Pilat selon E. Mulsant



Pour faire état des mystères du Pilat, qu’ils soient de n’importe quelle origine, d’orientation ou point géographique précis de ce secteur remarquable, il nous faut situer ce périmètre qui de tous temps frappe l’imaginaire des hommes.
Certes, nous prendrons la parole pour exprimer notre opinion sur cette contrée, mais nous préférons céder la parole à ceux qui le firent tellement mieux que nous ne le ferions. A cet effet, pour ouvrir le débat, il nous fallait un ténor en la matière, et notre choix s’est naturellement porté sur E. Mulsant. Ce dernier cumule les titres en matière de Culture et connaissances historiques en matières régionales :
Bibliothécaire adjoint de la ville de Lyon
Professeur d’histoire naturelle
Correspondant du Ministère de l’Instruction publique
Président de la Société linnéenne
Et tant d’autres qualifications, que nous ne pouvons citer toutes.
Etienne Mulsant
C’est à Lyon, aux Imprimeries Pitrat Aîné, qu’il fait éditer son monumental : ‘Souvenirs du MONT PILAT et de ses Environs’. Deux tomes seront nécessaires à ce travail colossal. L’extrait que nous présentons provient du premier tome de l’édition 1870. L’introduction de l’ouvrage à madame Lacène date de 1869. C’est toujours à elle qu’il s’adresse ensuite dans sa ‘Lettre Première’, que nous choisissons ici.
- - - - - - - - - - - - - - - - -
Etymologie de Pilat - Histoire - Légende
Carte du Pilat, selon Mulsant
Vous m'avez, madame, souvent entendu parler du mont Pilat, de ses sites pittoresques, de ses richesses naturelles, des vues admirables et de la perspective étendue dont on jouit en gravissant ses rampes, et, sans sortir de votre ravissante villa d'Ecully, vous désirez en faire avec moi le voyage.
Du Choul, Latourette, Mgr le cardinal Donnet, M.Seytre et d'autres, qui ont écrit sur cette montagne, aussi célèbre dans les Gaules, dit le premier de ces écrivains, que l'Olympe l'était chez les Grecs, pourraient vous aider à en faire l'ascension d'une manière plus agréable sans doute ; mais vous désirez suivre mes pas, et cette préférence a quelque chose de trop flatteur pour que je ne sois pas empressé de répondre à vos désirs.
En prenant, un peu légèrement, l'engagement de vous servir de guide,
Je me suis d'abord, à l'avance, 
Réjoui du plaisir si doux 
De pouvoir, par correspondance, 
Causer quelquefois avec vous.

Mais il n'est pas, dans le monde, de plaisirs sans mélange. Ma joie a été bientôt tempérée en songeant aux épines de la route, c'est-à-dire aux difficultés qui m'attendent pour vous rendre ce voyage attrayant.
Que n'ai-je votre esprit si fécond en ressources, votre imagination brillante, et ce style facile, souple et imagé, qui savent prêter tant de charmes aux pages écloses sous votre plume ?

Mais votre indulgente bonté produira, je l'espère, l'effet d'un prisme magique, en embellissant, à vos yeux, mes récits de couleurs qu'ils n'auraient pas sans ce secours.
Pour vous faire connaître le Pilat d'une manière convenable, il faudrait vous montrer sa physionomie aux principales époques de l'année; les montagnes ont, comme nous, leurs saisons: verdoyantes et gracieuses au retour des zéphires, fleuries et parfumées durant l'été, elles se montrent décolorées aux approches de l'hiver. Hélas,

Quelle femme fraîche et jolie, 
Durant les jours de son printemps, 
Ne connaît le pouvoir du temps, 
Quand elle avance dans la vie !

Mais on peut encore se consoler de la fuite trop rapide de ce vieillard, quand on a pu, comme vous, se voir, par un rare privilège, si ménagée dans ses outrages, et conserver en dépit de lui, cette fraîcheur de mémoire, cette vivacité d'esprit, ce rayonnement de l'intelligence et cette amabilité pleine de charmes qui semblent éterniser la jeunesse.
Aussi semblez-vous avoir inspiré les vers suivants de l'un de nos poètes les plus aimés de votre sexe :

L'amitié chaque jour ajoute à vos conquêtes,
Et l'on vous aime encor malgré l'âge où vous êtes,
Comme l'on vous aimait à l'âge qui n'est plus

On regrette le temps passé sans vous connaître, 
Combien l'on eût joui d'un commerce aussi doux! 
Il semble que plus tôt on aurait voulu naître. 
Pour avoir le bonheur de vieillir avec vous.
DEMOUSTIER.

Mais voyez avec quelle facilité vous me faites oublier le sujet de cette lettre ! Sans avoir l'intention de vous conduire avec la rapidité d'un wagon mu par la vapeur, sans vous faire monter l'Hippogriffe des héros de chevalerie, ou le Pégase des poètes, s'il nous fallait continuer à ne pas faire plus de chemin, nous irions moins vite encore que cet ancien courrier de la loterie, qui avait trouvé le secret de faire quatorze lieues en quinze jours.
Toutefois, avant de nous mettre en routé, peut-être ne serez-vous pas fâchée de connaître l'étymologie du lieu sur lequel se promène déjà votre imagination.

Quelques auteurs (Latourette, ‘Au mont Pilat’) font dériver le nom de Pilat, du latin pileatus (couvert d'un chapeau) épithète qu'on donnait aux prêtres des Goths, en raison de la singularité de leur coiffure (A).
Je me rappelle, à ce sujet, avoir lu autrefois, dans un registre tenu à la ferme que nous visiterons bientôt, une pièce de vers commençant par les suivants :

A lieu, Pilat fameux, dont la cime chenue
Ainsi que d'un chapeau se couvre d'une nue.

La montagne, en effet, cache souvent sa tête dans un nuage, et son front, voilé ou découvert, sert aux habitants du pays à pronostiquer le temps.
Lorsque Pilat prend son chapeau 
Avant trois jours on a de l'eau.

L'observation de cette sorte de chapeau dont se coiffent les montagnes élevées, dans certaines circonstances, n'est pas de date récente, comme l'a fort bien remarqué mon savant ami, M. Péan. « Ce phénomène a depuis longtemps attiré l'attention des peuples ; mais les vieux Ausoniens, à la place d'un pégase, y virent Jupiter assembleur des nuages, le dieu des espaces atmosphériques ; d'accord en cela avec les Ioniens d'Homère, qui croyaient y apercevoir Zeus, le roi du serein Olympe; avec les Aryas védiques, qui s'imaginaient y entendre Indra, le maître sublime de la sphère étoilée ; avec les Celtes enfin, nos aïeux, qui se flattaient d'y reconnaître les fantômes divinisés de leurs pères, ces Laoch neulach, héros vêtus de nuées et tissus de météores (‘Revue du Lyonnais’, 3e série, t.III- mars 1847) ».
Mais cette étymologie du nom de Pilat n'a qu'une origine relativement moderne.
Quelques écrivains ont fait dériver le nom de Pilat de pi, montagne, et de lat (Alléon Dulac, ‘Mémoires pour servir à l’hist. Nat.’ T.1), large, en nous donnant pour du celtique des mots dont l'origine est au moins en partie latine (B).
Certaines langues de l'Antiquité, dont quelques rares savants ont seuls le courage de s'occuper, sont pour les étymologistes, ce que la panacée universelle est pour les empiriques. C'est une mine où l'on peut trouver tout ce qu'on veut.

Si, pleine un jour de confiance 
En ces docteurs de grand renom, 
Vous demandiez à leur science 
L'origine de votre nom, 
Ils vous feraient, je le parie, 
Sans de grandes difficultés, 
Voir dans son étymologie, 
Vos plus brillantes qualités.

Toutefois, si cette science est parfois aventureuse et conjecturale, elle est d'autrefois une source de vraies lumières.
M. Péan, à qui le sanscrit et la plupart des langues orientales sont d'une étude aussi familière que le grec et le latin, a voulu nous prouver avec une grande érudition, dans la Lettre qu'il m'a fait l'honneur de m'adresser, à propos du mont Pilat (Revue du Lyonnais, mars 1867), que ce dernier mot provient du celtique, où l'élément initial pil, issu des langues de l'Orient, signifie montagne, cime plus élevée qu'une autre, et la terminale aie, aile, exprime ce que nous entendons par endroit ou région.
Après un maître de science aussi profonde, nous devrions peut-être regarder notre tâche étymologique comme finie.
Cependant César, dans ses ‘Commentaires’ (de Bello Gallico), Ptolémée et Strabon dans leurs travaux sur la géographie, parlent des Cémènes et ne citent nulle part le mont Pilat; aussi la plupart des écrivains chrétiens ont-ils pensé que cette sommité avait été appelée mont de Pilate ( cette montagne est appelée par d’anciens géographes mont de Pila ou mont de Pilate), pour rappeler le souvenir de ce gouverneur inique qui, par la crainte de déplaire à César, c'est-à-dire par un lâche et coupable respect humain, laissa mettre à exécution la sentence de mort prononcée par Caïphe, contre le Sauveur des hommes, dont sa conscience révoltée s'obstinait à lui proclamer l'innocence.
La justice divine ne tarda pas à le poursuivre. Déjà odieux aux Juifs, par ses exactions et ses actes de rigueur, il exerça des cruautés nouvelles envers les Samaritains révoltés. Les plus qualifiés d'entre eux, dit Flavius Josèphe (‘Histoire des Juifs’), le dénoncèrent à Lucius Vitellius (Père d’Aulus Vitellius, proclamé empereur en 69), préfet de la Syrie. Celui-ci enjoignit (En l’an 37, quatre ans après la mort de Notre Seigneur) à Pilate d'aller se justifier à Rome, auprès de l'empereur.
Quand Pilate arriva dans la capitale du monde, Caligula venait de succéder à Tibère, dont on avait hâté la fin. L'examen des plaintes formulées contre lui traîna un peu en longueur; enfin, en l'an 39, il fut condamné à un exil perpétuel dans la province viennoise, qu'on appelait alors Carcer Romanorum (prison des Romains).
Le souvenir de ses crimes l'y poursuivit; il cherchait en vain à écarter les images dont il était obsédé; à chaque moment il était tenté de s'écrier, comme Oreste :

Eh bien, filles d'enfer, vos mains sont-elles prêtes? 
Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes?

Ministre des vengeances célestes, le remords semble avoir été créé pour infliger, dès ce monde, un châtiment au coupable.
Pilate, au rapport d'Eusèbe (C), de Cassiodore (D), et de saint Adon (E), qui cite le témoignage de saint Matthieu, se donna la mort en l'an 40, et suivant la tradition, le mont Pilat fut témoin de son suicide (F).
Ce criminel exilé habitait probablement au pied de la montagne une demeure, aujourd'hui ruinée, connue encore, il y a deux siècles, sous le nom de château de Ponce (Lamure, ‘Histoire du pays de Forez’, 1674 et Fodéré, ‘Narration’).

Le vulgaire nomme aussi tombeau de Pilate (on donnait jadis le nom de Tour de Pilate à la tour appelée aussi Tour Vieille, qui couronnait l’une des piles de pont construit par les romains ; on prétendait que Pilate y avait été enfermé par ordre de Caligula et s’y était pendu) un monument situé dans la plaine, à un quart de lieue de la ville, entre le Rhône et la grande route. Ce monument, connu sous le nom d'Aiguille, a mis à la torture l'esprit des antiquaires. Les uns l'ont considéré comme l'analogue du milliaire doré de la ville de Rome (Point central à partir duquel on comptait les milles sur les différentes voies qui sortaient de la capitale du monde. Le monument de Vienne, placé près de la voie Domitia, paraît avoir toujours été hors de la ville); d'autres, comme le tombeau de Vénérius, fondateur prétendu de Vienne, mais dont l'existence paraît fabuleuse (‘Monuments romains et gothiques de Vienne’-1821). Au dire de plusieurs, ce serait un cénotaphe élevé par les Viennois, soit à l'empereur Auguste, suivant Chorier (‘Recherches sur les antiquités de la ville de Vienne’-1828), soit à Alexandre Sévère, d'après Schneider et Vietty ; Caylus (‘recueil d’antiquités’ -1752-67) et Millin (‘Voyage dans les départements du midi de la France’-1807) l'ont regardé comme le tombeau d'un personnage consulaire inconnu; et Delorme (‘L’Aiguille de Vienne’-1855), dont l'opinion paraît la plus probable, l'a considéré comme la Meta du cirque de Vienne.
Après l'histoire, laissons parler la légende.
Suivant elle, Pilate, après sa mort, épouvantait, durant la nuit, les habitants de Vienne par ses apparitions. Son ombre désolée troublait presque constamment leur sommeil. On résolut de transporter ses restes au loin ; on les jeta dans un lac (G) situé au sommet d'une montagne du canton de Lucerne, appelée encore aujourd'hui mont de Pilate (1).
L'ancien gouverneur de la Judée ne se trouva pas mieux en Helvétie que dans la province viennoise. Il s'y montrait aussi d'une manière fréquente. Chaque année, il sortait des eaux, revêtu de sa robe de juge. Malheur au pays si quelqu'un osait troubler son repos, en jetant un corps inerte dans ces ondes, fatales comme celles du Styx ; il était sûr d'exciter des tempêtes dans la contrée (L’opinion était jadis répandue que sur notre mont Pilat, près du puits de Pilate, il se formait aussi des tempêtes horribles - Du Choul -1555) ou de causer malheur aux bergers faisant paître leurs troupeaux dans les environs.
Quoiqu'il en soit, ces idées avaient un tel crédit dans le Moyen-Age que, jusqu'à la fin du seizième siècle, il était interdit d'aller au sommet du mont Pilate sans une permission du magistrat (H).
Des hommes courageux prirent enfin le parti de faire des cérémonies expiatoires sur ces lieux élevés; on jeta dans le lac un grand nombre de pierres, en proférant des imprécations contre l'esprit de Pilate ; il ne survint point de tempêtes, et depuis cette époque, l'opinion publique a été rassurée sur le pouvoir magique de l'ancien gouverneur de la Judée.
Je ne sais si l'ombre de cet homme ose se montrer près des sources du Gier, sur notre Pilat : dans tous les cas,

Le saut du Gier, selon Mulsant
Quand les farfadets, les gnomes, 
Les monstres les plus odieux, 
Les plus épouvantables fantômes, 
Viendraient exercer dans ces lieux 
Leur diabolique industrie, 
D'y porter vos pas curieux 
S'il vous prenait la fantaisie, 
Chacun de nous serait jaloux 
De vous servir de compagnie 
Et de voyager avec vous.

- - - - - - - -
Notes
-A. Nous pourrions ajouter ici, à propos du mot Pileatus : le Parnès, montagne de l'Attique, par la situation de son chapeau de nuées, est tantôt un signe certain de pluie et de tempête, et tantôt un indice non moins sûr de beau temps. Ces circonstances expliquent pourquoi les anciens avaient élevé sur le Parnès un autel de Jupiter aux présages (HANMOT, ‘Recherches sur la topographie des Dèmes de l'Attique’, p. 106.)
Nous n'avons pas cru devoir mentionner l'opinion de ceux qui font venir le mot de Pilat de Pilotus, chauve, pelé. (MARTIAL, Épigr. VI, épig. 56. - POMPONIUS FESTUS.édit. Panckoucke, lib. XIV, p. 351. —Alf. , DE TESREBASSE, Revue du Lyonn., 2e série, t. XIII, 1856, p. 273).

-B. Le mot lat (latum) est d'origine latine. Du mot gaulois pi ou pic les Romains ont fait podium. Ce nom, qui d'abord servait seulement à désigner une sorte d'estrade élevée, sur laquelle prenaient place, au théâtre, les empereurs et autres grands personnages, fut appliqué plus tard à des tertres et à des montagnes. Ainsi, Théodulfe, évêque d'Orléans, a dit :
Hic scabris podiis cingitw : illa mari.
Le mot pi ou pic, transformé en podium, et dérivé peut-être du sanscrit pil, a subi dans notre langue de nombreuses modifications. Dans notre Midi il s'est transformé en puch, puech, pouch, peuch ; dans les provinces centrales, en peu, po, pi, pié, pui, puy (Piégut, Puy-de-Dôme), le py ou puy du Pila (PARADIS), etc.
Les habitants de ces montagnes donnent au nom de Pilat une étymologie si curieuse que je ne puis m'empêcher de la faire connaître.
Saint Sabin, suivant eux, avait un frère retiré dans une gorge profonde, près de Malleval. Les deux frères, malgré la distance qui les séparait, avaient le secret de se faire entendre.
Saint Sabin dit un jour à son frère :
- Tzesse biou ma la vais (malavais, Malleval),
(Tu es bien mal là-bas.)
L'autre lui répondit :
- Tzesse biou pi la (pila, Pila) mou.
(Tu es bien pis là-haut-.}
De là l'origine de Pilat.

- C. Eusèbe (Pamphile) naquit en 267, sous le règne de Galien, fut évêque de Césarée, ville de Palestine, bâtie par Hérode le Grand, en l'honneur d'Auguste. Eusèbe mourut en 338. Il s'exprime ainsi; Pilatus in inultis incidens calamitatibus,propria se manu interficit. (EUSEBII, Chronicon; Parisiis, 1518; in-fol., p. 84, b.)
- D. Cassiodore (Aurelius Gassiodorus), ministre de Théodoric, roi des Goths, naquit à Squillace, vers l'an 470; fonda dans sa vieillesse le monastère de Vivien, en Calabre, et y mourut âgé de plus de cent ans. Il raconta la mort de Pilate à peu près dans les mêmes termes qu'Eusèbe. (CASSIODOM, Opéra; Rotomagi, 1679, t. I, p. 386, b.)
- E. Saint Adon, archevêque de Vienne, naquit en Gâtinais vers l'an 800 et mourut le 8 décembre 875. Voici comment il s'exprime au sujet de Pilate : Pilatus qui sententiam damna-tionis in Christum dixerat, et ipso rperpetuo Viennœ recluditur, tantisque ibi in rayante Caio languoribv.s coarctalus est, ut sua se transverberans manu, malorum compendium mortis celeritate quœsierit. Mattheus Evangelium in Judaea prcedicans, hebraicis litteris scripsit. (ADONIS, Breviarium chronicorum ; Parisiis, 1561, p. 114 : et Basileœ, 1568, p. 109.)
- F. Suivant la tradition, Pilate se serait poignardé sur le bord d'une espèce de puits ou de gouffre, aujourd'hui comblé, qui formait la source du Gier.
Du Choul, dans sa description du mont Pilat, a dit : In gremio Rupis jacet uda, illa et quiescens palus, quarn Pilaii puteumvulgus nuncupat. (J. DU CHOUL, Pylati montis des-criptio. Lugdun., 1555, p. 76. — Id.; nouv. édit.; Lyon, Pitrat Aîné, 1868, p. 26.
On a fait sur le genre de mort de Pilate diverses autres versions : suivant quelques-uns il se serait pendu, suivant d'autres il se serait jeté dans le Rhône; mais ces opinions ne reposent sur aucun fondement.
Les personnages qui jouèrent les principaux rôles dans la Passion de Notre Seigneur n'ont pas tardé à porter la peine de leur crime. Leur histoire est un véritable enseignement. L'infâme Judas, poussé par le remord de la trahison horrible qu'il avait commise, se pendit; son ventre se déchira et ses entrailles se répandirent.
Joseph, surnommé Caïphe, créé grand prêtre des Juifs, en l'an 25 de notre ère, après Simon, fils de Camithe, fut destitué en l'an 35 (c'est-à-dire deux ans après la mort de Jésus-Christ) par Vitellius, qui voulut en cela être agréable aux Juifs.
Pilate, comme nous l'avons dit, fut envoyé à Rome, en l'an 37, pour se justifier de ses cruautés envers les Juifs; en 39, il fut condamné à un exil perpétuel ; en 40, il se donna la mort.
Hérode le Tétrarque, qui avait enlevé Hérodiade à son frère dont elle était l'épouse, contraint par cette femme, jalouse des honneurs dont son frère Agrippa avait été comblé, d'aller aussi à Rome solliciter une couronne, fut également envoyé en exil dans la province viennoise. Après la mort de Caligula il se sauva en Espagne avec Hérodiade et y mourut de chagrin. Hérode le Grand, surnommé l'Infanticide, dont les dernières années furent troublées par tant de misères, mourut de la maladie pédiculaire, l'année même du massacre des Innocents, un an après la naissance du Sauveur.

1- Le mont de Pilate est aussi appelé Frakmont (fractus mons, montagne brisée, ob frangosam asperitatem et poecipitem altitudinem, dit Vadianus, Commentaires sur pomponius Mela ; Basilem, 1522 ? Suivant d’autres personnes la dénomination de la montagne du canton de Lucerne viendrait aussi du latin pileatus. Millin prétend que les restes de Pilate, après avoir été retirés du Rhône, où il s’était noyé, furent jetés dans le puits situé vers le sommet du mont Pilat)
- G. Hemmerlin, plus connu sous le nom de Félix Malleolus, écrivain du quinzième siècle, est le premier, dans son traité De exorcismo, p. 76, qui déclara d'une manière formelle que le lac dont il est ici question était le tombeau de Pilate. Une fois cette opinion mise en avant, il la reproduisit dans son Dialogue entre un noble et un paysan, ch. xxxic, p. 126, a. Après Malleolus, les traditions fabuleuses relatives à cette montagne se glissèrent jusque dans les ouvrages des ailleurs les plus estimés. Sébastien Munster, géographe en renom dans la première moitié du seizième siècle, rapporte sans hésiter dans son Traité de l'Allemagne, liv. III, ch. LXXIII, tous les récits faux ou puérils qu'on avait faits sur le mont de Pilate. Autant en firent STUMPFIUS, dans sa Chronique (liv. III, ch. V) et JOACIIIM VADIANUS, médecin de Saint-Gall, personnage consulaire, dans ses Commentaires sur Pomponius Mêla; Basil eîe, 1522; lib. I, cap. vin; Cyrenaica, p. 34.
Voy. CAPPELEB, Maur. Antonii Cappelleri Pilati montis Historié; Basileœ, 1767, in-4°.

- H. En 1554, Gessner le Naturaliste eut besoin de cette permission pour aller herboriser sur cette montagne. (Voy. MunitAY, Hand-Book; 1840, p. 42.)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire