dimanche 28 août 2011

la Madeleine

Pour ouvrir sur ce site la rubrique Châteauneuf et Béatrix de Roussillon, fille De la Tour, nous présentons un petit article concernant les fêtes et cérémonies religieuses des sites au bas du castel. Il s’agit d’une mémoire à propos du secteur où se trouvait l’ancienne chapelle Ste Madeleine, le quartier du même nom et le franchissement du Gier. Ce texte est tiré d’un journal régional de la vallée du Gier, de mi-juillet 1931. Nous ne résistons pas au plaisir d’ajouter un autre ‘encart’ où il est question de la ‘bénédiction des véhicules’… On voit effectivement que tous ces derniers sont concernés par la cérémonie… même les voitures d’enfants du type ‘poussette’ et ‘landau’… Cette anecdote assez insolite méritait d’être également présentée.

En lisant le journal du Gier…

«Grandes Fêtes Patronales et Fête des Moissons.
- Notes historiques -
Aux habitants de Châteauneuf, la Madeleine, Saint-Jean, Saint-Joseph, Saint-Maurice, Tartaras, Trêves, Longes, etc. : Dimanche 26 juillet, l'antique église de Châteauneuf, annexe de celle de Saint-Jean, célèbre en même temps, comme le veut la liturgie, la fête de Saint Christophe, son patron, qui est de 1ère classe, et celle de Saint Jacques, qui est de 2ème classe. La solennité comporte une messe solennelle à 8 h. 30 et des vêpres solennelles, en plein air quand le temps le permet, à 17 h. 30. Diverses bénédictions accompagnent ces deux cérémonies et demandent quelques mots d'histoire et d'explication.
La Saint-Jacques amène avec elle, dans toutes les paroisses rurales, la bénédiction des fruits nouveaux et des épis ; c'est, à Châteauneuf, la Fête des Moissons. L'église est décorée avec des épis et tous les assistants, le matin et le soir, portent à la boutonnière ou au corsage, trois épis symboliques et, à la main, un bouquet d’épis. C’est la ‘Croix de blé’ qu’a chantée un de nos poètes et que les agriculteurs fixent à la porte de leurs maisons, de leur grenier à blé. Il y a, comme de coutume, la distribution du pain bénit, offert à tour de rôle par quelque famille notable. Mais, au pied de la colline de Châteauneuf, coule le Gier qui reçoit son affluent, le Bosançon. De l'autre côté du Gier existait, depuis le XIIIe siècle, la vieille Chapelle des Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, gîte d'étape, avec cimetière, et dédiée à Sainte Madeleine et à Saint Jacques. Elle s'ouvrait directement sur le Bosançon dont le lit, comme celui du Gier, servait de route à l'époque des basses eaux. Mais, à l'époque où ces rivières n’étaient pas guéables, un passeur faisait le service de liaison entre les deux chapelles, d'où le patronage de Saint Christophe donné, dès l'origine, à la Chapelle de Châteauneuf.
Les Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, possessionnés dans les environs de Rive-de-Gier, assuraient la protection des routes, jusqu'à Feurs (la route de Vienne à Feurs passait par Dargoire) et jusqu'à Chazelles, leur résidence. La maison hospitalière de la Madeleine, près de la chapelle, appartient maintenant à la famille de Joseph Mouton. La cuisine antique est entièrement conservée et le portail porte le vieux blason : c'est l'explication de la bénédiction des routes de ce carrefour qui se fait le soir du haut de la colline et qui vient, à notre époque moderne, compléter la bénédiction des autos, faite à Saint-Jean.
La Chapelle de la Madeleine et la Maison hospitalière étaient séparées par un pré qui s'étendait au bas jusqu'au Gier et qui fournissait le foin pour le ravitaillement des mulets. Ce pré a été coupé par la nouvelle route de Lyon en 1879 et, dans sa partie inférieure, la plus grande, se tient toujours, de la Sainte Madeleine à la Saint Christophe, la très antique et célèbre foire dite ‘de la Madeleine’, qui était une succursale de celle de Beaucaire. Cela représente une affluence jadis considérable à la Maison hospitalière, sans parler du trafic de la vieille route de Lyon qui passait juste au nord de la Maison pour aboutir devant la Chapelle. La pente en a été adoucie en 1786 par un pont d'une seule arche. La même année, le 22 novembre, la Chapelle, pour cause d'excès commis par de mauvais sujets, fut interdite par Mgr de Montazet, et sa démolition ordonnée par M. de Lacroix de Laval, vicaire général. Cette décision ne fut pas exécutée et la piété des fidèles pèlerins fut plus forte que la décision épiscopale. En 1830, la Chapelle, délabrée pendant la Révolution, fut restaurée par M. Journoud, généreux chrétien de Rive-de-Gier, qui fit refaire les croisées du choeur et la toiture. Cette restauration ne dura pas très longtemps. La paroisse de Saint-Maurice, y voyant une concurrence, s’en désintéressa. La paroisse de Saint-Jean, créée en 1838, qui reçut et conserva canoniquement ce quartier pendant huit ans, n'avait pas les moyens, ayant une église à bâtir, de soutenir cette charge. Finalement, la Chapelle de la Madeleine, en ruines mais toujours visitée par les pèlerins, qui faisaient brûler des cierges dans les ronces qui l'envahissaient, fut non détruite mais ensevelie sous des déblais. Nous avons heureusement sa photographie et son plan. Le culte de Sainte Madeleine et de Saint Jacques fut transféré à Châteauneuf. A cette affluence considérable de pèlerins, d'acheteurs de la foire venus de toute la région et de très loin, des muletiers des mines se joignirent pour la grande fête patronale qui dure plusieurs jours, puis les ouvriers, puis les bateliers du canal dans le premier tiers du XIXe siècle. Ils avaient, à Rive-de-Gier, leur centre de ravitaillement, avec une immense écurie pour les chevaux de halage, dans une auberge qui prit l'enseigne de ‘la Pomme’, actuellement au Cercle de Saint-Jean. Ce contingent nouveau, à son tour, fêta Saint Christophe avec Saint Nicolas, puis ce furent les ouvriers constructeurs de la nouvelle voie du chemin de fer, lequel tua le trafic du canal. Saint Christophe de Châteauneuf adopta à nouveau les cheminots; et voilà pourquoi, du haut de la colline, dimanche prochain, aura lieu, en même temps que la bénédiction des routes, celle de la voie ferrée.
Châteauneuf est depuis longtemps un lieu de pèlerinage pour demander la pluie. Des paroisses entières comme St-Martin-la-Plaine, St-Maurice-sur-Dargoire, St-Didier-sous-Riverie y viennent en procession et leurs prêtres y célèbrent la messe. Avant la Révolution existait une curieuse cérémonie. La procession ‘pour demander la pluie’ allait de la Chapelle de Châteauneuf à celle de la Madeleine et traversait deux fois le Gier guéable ; on portait l’antique statue de Saint Christophe sur un brancard et, au passage du Gier, on la déposait au milieu de la rivière, dans le peu d’eau qui restait, pendant que prêtres et fidèles faisaient les prières liturgiques.
Cette antique statue en bois fut cachée pendant la Révolution et on ne ‘trempa’ plus Saint Christophe dans le Gier. Rendue au culte par un fils de celui qui l’avait cachée et gardée, habitant Trêves en 1870, elle fut installée dans l’église de cette paroisse qui ne put réussir, malgré tous les efforts de l’abbé Chavanne, curé de Trêves à cette époque, à détourner le culte de Saint Christophe de Châteauneuf.
Ces quelques notes seront sans doute agréables aux nombreux pèlerins qui, pendant les jours de la foire de la Madeleine et dimanche prochain, graviront la colline et prendront part à nos belles cérémonies. »
- - - - - - - - - -
« Bénédiction annuelle des automobiles à Saint-Jean.
La fête de Saint Christophe, patron de notre église de Châteauneuf et second patron de notre église de Saint-Jean, est l’occasion chaque année, depuis 9 ans, le dimanche de la Solennité, soit dimanche prochain 26 juillet, d’une double bénédiction solennelle, place St Jean sur le côté sud de la route de Lyon, des automobiles, cycles et tous véhicules : chars à bancs, voitures d’enfants, même le tramway. C’est chaque année un spectacle intéressant, et chaque année quelques journaux en donnent la photographie.
Il y a deux cérémonies semblables : la première à 6 heures précises, précédée d’une messe à 5h.15 : la deuxième à 10 heures précises, précédée d’une grand’messe à 9 heures pour les automobilistes et voyageurs et suivie d’une messe à 10h.15.
Les voitures se rangent sur la vaste place ; après la bénédiction collective, toutes les voitures font le tour de la place pour défiler devant le clergé qui bénit les voyageurs. ».
- - - - - - - - - - - - - - - - - -
En franchissant le Gier sous Châteauneuf…
Ces éléments étaient, comme nous le voyons, à la portée de tous lecteurs de ce journal. Nous relevons, dans ce texte, les fêtes votives de la Madeleine au pied de Châteauneuf et les saints personnages honorés à ces occasions, directement ou indirectement : St Christophe, Ste Marie-Madeleine, St Jean et St Jacques.
Nous reviendrons, au fil de prochains chapitres, sur ce qu’il convient d’appeler la Maison des Hospitaliers, surplombant le quartier de la Madeleine, mais aussi les différents gués de ce secteur, et enfin le lieudit ‘la Pomme’ ainsi que ‘le pont de la Pomme’ du quartier St Jean de Rive-de-Gier. Certes, on pourrait nous répliquer que ces thèmes sont hors le périmètre du Pilat puisque précisément dans la vallée du Gier. Cependant, nous maintenons ces choix en raison du fait que ce sont des endroits qui avaient un rôle dans le franchissement du Gier et l’accès aux voies et chemins utilisés pour accéder au Pilat. Ensuite, évidemment, nous reviendrons en détails sur le site de Châteauneuf, son passé, son rôle, ses ‘curiosités’, ses maîtres avant les de Roussillon, ainsi que Guillaume et Béatrix, fondatrice de la chartreuse de Ste Croix en Jarez.
Nous nous contentons cette fois d’aborder les quelques éléments concernant le franchissement du Gier vers l’antique chemin, disparu depuis 1750, qui conduisait à Trèves et, de là, à proximité du fameux arsenal de Béatrix qui intrigue tant de chercheurs incapables de le situer.
Ce vieil accès, par endroit établi en véritable ‘chemin creux’, était le seul permettant de rejoindre, jusqu’au 12e siècle notamment, deux mines de fer. C’est une de ces deux exploitations qui aurait pu être encore en activité au moins jusqu’en 1395 par les chartreux, comme en fait mention un acte de Ste Croix à cette date. Il semble cependant que le rendement ait été en s’affaiblissant alors que la demande de métal allait en augmentant de façon significative.
La Pierre Flage et une borne …
Toujours est-il que ce secteur dut être connu des romains et probablement bien avant, comme en témoignent quelques découvertes faites lors de défrichements, comme en fait état un échange de notes et courriers entre un maire local et un religieux de la paroisse de Rive-de-Gier. Non seulement les vestiges de l’antique chemin ‘creux’ sont encore visibles en deux endroits, mais on retrouve également des ‘abris sous roches’ et quelques points mégalithiques, certes de moindre importance que leurs frères plus connus du Pilat. Cependant, nous ne connaissons pas une autre pierre ‘sonnante’ comme celle connue (encore de quelques personnes âgées locales) sous le nom de ‘pierre Flage’, à peu de distance dans les taillis du vieux chemin, à environ 1 km de Trèves et proche de Cenna. Sur ces roches oubliées se lisent de nombreuses cupules et pétroglyphes sur lesquels nous ne manquerons pas de revenir prochainement en détail.
Pour l’instant, nous dirons que les franchissements du Gier devaient être strictement délimités et contrôlés depuis le Moyen-Âge puisqu’un habitant du hameau de ‘la Fléchette’ détient encore une ‘borne à chaîne’ fermant l’un de ces passages de rivière. Certes, on pouvait douter que ce genre de témoin, pas vraiment unique, provienne du secteur de Châteauneuf et de ces traversées du Gier. Cependant, nous avons la chance que soit restées, bien qu’un peu effacées par le temps, quelques gravures sur trois faces de la borne à chaîne. On y voit, sur un des côtés, l’obscur blason simplifié de Cenna. Sur un autre pan se dessine ce qui pourrait être une patte d’oie ou une sorte de trident. N’oublions pas, à ce propos, cette mystérieuse gravure, au fond du puits souterrain de Châteauneuf, représentant trois symboliques épis de blé. Si à ceci nous ajoutons la fête (sans doute antique et païenne) du blé, célébrée au pied de Châteauneuf pour la St Jacques, nous pourrions trouver ici matière à réflexion et… ‘du grain à moudre’ ! Enfin, sur la dernière, un lourd anneau de fer est encastré dans un visage d’animal, en relief, surmontant une mince croix pratiquement pattée. Sous cet ensemble se lisent des lettres et chiffres pouvant être :
+
+O+
ME FICT
FEYR CARDET
+
+CRISTO+
AS 1587 ST
*
Dès obtenue l’autorisation du propriétaire - dont le père en avait déjà fait communication au père Granjean - d’en produire des photos, nous donnerons une étude complète de cette borne ainsi que l’endroit précis où elle fut récupérée. Il y avait encore en 1957, près de ce lieu, les vestiges dévastés d’une sorte d’ancien oratoire funéraire (acte mars 1957 G. NATAULET -exploit déplacement-).
Béatrix et le triptyque…
Mais ceci est pour nous l’occasion, maintenant, de revenir sur Châteauneuf et sa dame la plus connue : Béatrix de Roussillon. Un premier chapitre, relatant en détails la légende de la fondation de Ste Croix, lui est consacré sur notre site Société Périllos. Aussi, nous nous contenterons de présenter une statue triptyque, peu citée jusque là, dont la rareté -cinq seulement pour cette région- mérite d’être soulignée, en plus du fait qu’il y ait de solides chances pour qu’il s’agisse probablement de la plus ancienne. Béatrix, selon la tradition, en aurait fait don au moment de prendre le voile des veuves… ce dernier et la statue auraient été bénits simultanément le 20 janvier 1278 par son beau frère, archevêque de Lyon.
On y voit Sainte Anne, tenant dans sa main gauche un livre fermé et portant la vierge Marie couronnée sur ses genoux. Cette dernière tient à son tour, également sur ses genoux, l’enfant jésus présentant un petit globe dans sa main gauche. On dit encore que Béatrix aurait voulu que les traits de son visage soit ceux de Sainte Anne, et que le vêtement de la sainte soit la fidèle reproduction de celui des dames de son époque et de cette contrée. C’est dire l’importance de cette représentation des plus rares.
Quant aux chevelures des personnages, on voit Ste Anne voilée entièrement y compris avec la ‘mentonnière’. La Vierge Marie est coiffée d’une couronne à six fleurs de lys. L’enfant a, semble t’il, les cheveux libres, longs et ondulés.
Le livre que tient Anne est non seulement fermé mais également clos par une ferrure…
En retournant la statue (avec d’immenses précautions et un profond respect !), on constate que la sculpture a été faite dans une seule pièce de bois et on trouve deux étiquettes collées : l’une, rectangulaire, est quasiment illisible ; celle d’en haut, ronde, porte le nombre ‘77’… qui est, sans doute, son identifiant dans le ‘classement’ du ‘musée’ de Fourvière.
On trouve également un piton métallique, sans doute prévu pour maintenir la statue contre le mur. Au dessus de celui-ci, la tête d’un clou très ancien apparaît… sans qu’on en comprenne l’utilité. Au haut de l’œuvre, deux trous (vers l’étiquette ronde) laissent penser qu’une autre fixation devait finir d’assurer l’ancrage et la tenue bien verticale. Le ‘banc’, sur lequel Ste Anne est assise, est creux. Si on peut supposer que le sculpteur ait voulu alléger son œuvre, on sait qu’autrefois cette cavité comportait d’importantes traces, vaguement rectangulaires, de cire jaunâtre avec des cassures nettes. Visiblement, il y avait quelque chose de fixé à la cire à cacheter dans ce creux qui alors devait faire office de ‘tombeau’ pour une relique par exemple. Mais, comme Béatrix vivait au moment de cette représentation, on peut exclure que la ‘mémoire’ lui soit attribuée. Il nous reste néanmoins l’hypothèse d’un vestige voué à Ste Anne, la Vierge Marie et… Jésus (éclat de bois de la ‘vraie’ croix par exemple). Il se peut aussi qu’il y ait eu autre chose de fixé dans ce creux, comme par exemple une petite capsule avec un contenu plus ou moins sacré, superstitieux ou… historique ! Ce qui est pour le moins curieux, c’est qu’en quelques années (nous n’avions pas revu cette merveille depuis près de 20 ans) tous les vestiges de la cire à cacheter aient disparu… Ce n’est, en fin de compte, pas très grave puisque nous avons d’anciens clichés où ce ‘détail’ se voit parfaitement…
Béatrix, après son retour des réserves du musée, prit place sur la cheminée de la salle des délibérations de l’ancienne mairie de Châteauneuf. Puis elle fut reléguée… dans un placard. Enfin, maintenant, elle préside, sur une cheminée de marbre noir, aux mariages, dans la superbe salle prévue à cet effet. Les nouveaux mariés ont-ils un regard pour cette dame fondatrice de la chartreuse de Ste Croix (du moins dans son seul aspect visible et extérieur !!!) ? Nous l’espérons… En attendant, elle repose, énigmatique et hautaine, en compagnie d’un imposant buste d’une Marianne ‘phrygiennement’ républicaine et de la statue de St Etienne. Ce dernier, ayant encore toute sa polychromie, porte les cailloux de son martyre (il fut lapidé) dans le pli de son manteau au-dessous duquel se cache sa main gauche. Une autre pierre sur sa tête suggère le supplice. Le personnage tient dans sa main droite, anormalement grande, un livre, aussi fermé.
Décidément, la statuaire de Châteauneuf ne laisse guère deviner le contenu de son savoir tenu fermé aux visiteurs.
Les merveilleuses réserves du musée de Fourvière…
Vers 1789, la sculpture disparaît, discrètement mise hors de portée par des mains pieuses, de la fureur révolutionnaire et ses brasiers… jusqu’en 1934 où elle sera retrouvée par le père Granjean. Il est des plus curieux d’apprendre que ce prêtre la récupère dans les réserves du musée de Fourvière à Lyon. Si certains attribuent cette ‘retrouvaille’ à la chance, nous émettrons, quant à nous, des remarques moins dociles. En effet, comment expliquer cet heureux hasard sans quelques ‘coups de pouce’, comme celui de remonter jusqu’à ceux qui vivaient un siècle et demi auparavant et qui, ‘sachant’ le pieux geste, en avaient soigneusement informé leur descendance à toutes fins utiles. Mais ceci ne nous suffit pas car même si Granjean put, par sa fonction de prêtre, ‘délier’ les langues et les mémoires, ce genre de ‘confession’ n’explique pas tout. En effet, il reste à savoir par quelle phénoménale providence cette vénérable statue fut retrouvée par les rabatteurs ecclésiastiques de l’évêché et dissimulée, car c’est le seul mot qui convient ici, dans les ‘réserves’ du musée de Fourvière. Et, ici, le seul fruit du hasard ne nous suffit pas comme explication. Nous ajouterons que, non seulement il fallait savoir où la récupérer, donc disposer d’informations précises, mais encore le faire discrètement… sans éveiller de soupçons ou bavardages, et ensuite porter beaucoup d’intérêt à ce précieux témoin d’une ‘autre’ histoire de cette région. Il serait, avant tout, indispensable que l’évêché ait su l’existence d’une statue sur un territoire qui n’est pas le sien (Loire et non Rhône), et lui porte une telle importante attention qu’il envoie ses ‘représentants’ pour une récupération quasiment clandestine. Ensuite, si l’on en croit le bon père Granjean - et pourquoi ne le croirions-nous pas - après toute cette opération ‘commando’, l’objet de tant de convoitise… est relégué dans ‘les réserves du musée de Fourvière’, comme une vieille chose sans intérêt. Il y a là de quoi s’interroger sérieusement. Mais ensuite, si l’on en croit le père Joseph Garlatti, la statue de Châteauneuf n’était pas le seul objet, en provenance de Châteauneuf, caché au moment de la Révolution. L’information que nous détenons fait mention, certes, d’un acte pieux ayant sauvegardé des témoignages religieux populaires d’un secteur du Pilat… Il est précisé, en outre, que la main qui mit à l’abri la statue et d’autres objets sacrés n’était pas celle d’un profane mais bel et bien d’un chartreux dont on nous a également donné le nom !
L’écrit de l’abbé Garlatti et le beau fruit
C’est précisément l’abbé Joseph-Marie Garlatti qui informa un prêtre du secteur proche de Rive-de-Gier de l’existence de la statue triptyque. Ce dernier confia l’information au père Granjean… au moment où il sut que celle-ci était à la veille (ou presque) d’être évacuée à destination d’horizons étrangers ensoleillés, où elle était destinée à une autre vénération plus… élevée ! Il est possible, selon cette source écrite provenant d’une cure de la vallée du Gier, que les ‘réserves du musée’ aient ‘échangé’ la statue de Béatrix contre le fait que le ‘reste’ ne soit jamais réclamé ! Il semblerait que la transaction ait bel et bien eu lieu… Nous disposons, heureusement, de la liste exhaustive du fameux ‘reste’ et il est bien possible qu’une partie d’une certaine affaire ‘Ste Croix’ puisse être éclairée sous un jour nouveau, difficilement contestable par les autorités et quelques habituels grincheux de service. Ces éléments très surprenants seront divulgués, le moment venu, dans une présentation de vulgarisation mise à la portée de tous, ainsi que sur nos sites. Pour ceux qui pourraient, innocemment, accéder à la statue et la retourner, ils devraient retrouver au dos son étiquetage dans les fameuses ‘réserves’ oubliées… On s’apercevrait, alors, qu’il est peu probable que l’image triptyque de Béatrix, Marie et Jésus, ait séjourné longuement, afin de discrétion, sous un tas de fumier comme le murmure la tradition populaire, avant de ressurgir à l’issue des ‘tenaces’ recherches du père Granjean… Il serait alors amusant de savoir à quel Ordre appartenait l’excellent abbé Joseph-Marie Garlatti… le seul à qui, en fin de comptes, nous devons ce retour prodigieux.
St Anne, Arques
Il reste à dire que cette œuvre du XIIIe siècle est encore polychrome, certes aux couleurs fatiguées et écaillées, au moment de son exil forcé… loin de sa chapelle natale. Curieusement, elle ressortira ‘couleur bois’ des oubliettes de Fourvière. Ensuite, il y eut, nous dit-on, une restauration qui a effacé toutes traces de polychromie, comme on le constate aujourd’hui. Ce n’est pas vraiment grave car nous pourrons, depuis nos informations, reconstituer, depuis un montage photographique, sa véritable coloration et ses écrits.
Il reste une dernière chose à ajouter concernant cette émouvante statue… ce sera de savoir dans quelle essence de bois elle fut sculptée. Sans doute, ceux qui suivent de près nos recherches auront-ils compris que Béatrix fut taillée dans du… poirier. « On voit un bon arbre à ses fruits… » dit le proverbe.
A propos de poirier et donc de… poires, nous ajoutons qu’il existe une autre, très ancienne, statue triptyque devant retenir tout notre intérêt dans l’affaire qui nous préoccupe. En effet, le visiteur attentif admirera une représentation triptyque similaire dans l’Aude, à Arques ! L’œuvre se trouve dans une chapelle latérale solidement sécurisée, en compagnie d’un grand tableau que nous intitulons, librement, ‘le petit Jésus à la poire’… Là aussi, nous voyons Ste Anne tenir sur ses genoux la Vierge Marie portant l’enfant Jésus. Précisément, nous retiendrons que les familles de Lupé (dans le Pilat) et celles d’Arques eurent des alliances pour le moins insolites… Il est donc tout naturel, en raison de nos recherches, que notre attention se tourne vers le savoir fermé d’une autre famille profondément impliquée dans une énigme phénoménale… les de Périllos (consulter sur le sujet le site SP) dont le blason s’orne précisément de trois poires !
André Douzet
Nous remercions le personnel de la mairie de Châteauneuf pour son amabilité, ainsi que Jérôme Fertier pour les anciens articles de journaux qu’il nous a transmis.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire