dimanche 28 août 2011

Les Peintures de la Chapelle des Pères : 1ère partie. des fresques classées et la chronique de leur agonie annoncée

Petit constat préliminaire et indispensable
Nous avions précédemment, en visitant l’ancienne chapelle des Pères chartreux de Ste Croix en Jarez, aperçu le soupirail qui relie ce local en rez-de-chaussée avec ce que nous appellerons arbitrairement une crypte située au-dessous.
Si, lors de cette visite, nous baissions notre regard au sol, nous allons maintenant l’élever jusqu’aux fresques murales qui ornent ces vénérables murs.
Rappelons que depuis sa remise à jour cette œuvre n’a pas toujours été accessible au public, loin s’en faut ! Si nous en retracerons, au fil de ce dossier, les péripéties dont nous avons connaissance, il faut dire, n’en déplaise à ceux qui marchent sur nos brisées, que cette partie culturelle, religieuse et sans doute aussi un peu ésotérique, du passé de cette chartreuse, était, hormis l’autorité municipale, parfois totalement inconnue des vieux habitants de Ste Croix.
Il y a trente cinq ans, lorsque nous commencions à nous intéresser de plus près aux vestiges primitifs rescapés de cette chartreuse, rien ne signalait au visiteur la présence de ce témoin irremplaçable. A l’entrée du village, le panneau destiné à l’activité touristique (si cette appellation avait alors le moindre sens) ne faisait pas mention de cette peinture. Seuls quelques spécialistes en avaient connaissance… et encore ! Pour aller visiter la chapelle des Pères, il fallait aller demander au curé la clé du local, et le plus souvent il vous accompagnait en grommelant sur l’inutilité de l’affaire. Ensuite, le parcours du combattant commençait, à travers des fagots et amoncellements hétéroclites dignes d’un inventaire à la Prévert, pour parvenir à voir entièrement cet extraordinaire chef-d’œuvre. A cette époque, il n’y avait pas foule et nous étions les seuls à solliciter le brave curé de Ste Croix. Seul l’ancien maire d’alors, un homme particulièrement cultivé et intéressé par le passé de sa commune, pouvait parler de ce vestige de l’art du 13e siècle. Combien de samedis après-midi avons-nous passé en sa compagnie et celle de sa documentation, qui nous faisait pâlir d’envie, à lire toute cette érudition sur la grande table de sa cuisine.

Peu à peu, les choses ont évolué… N’en déplaise à ceux que nous dérangerons par nos présents propos, nous avons été les premiers à relever certaines anomalies sur cette fresque, grâce, une fois de plus, aux connaissances de Raymond Graü, et ensuite les premiers à en parler en public et à commencer à amener les premiers chercheurs réellement intéressés par la question.
Aujourd’hui, il n’en est plus de même, et tous de faire étalage de leur science sur le sujet, en évitant prudemment, à leur avantage, de faire référence à Raymond ! Evidemment, il est plus facile et moins dangereux d’enfoncer, à grands bruits, des portes grandes ouvertes. Nous verrons qu’à présent il est d’autant plus facile de nous dénigrer que la fresque a subi une dégradation naturelle notoire et des modifications pour le moins curieuses… Mais, le plus important réside dans le fait que chacun peut contempler la chapelle des Pères, et ses peintures, avec les plus grandes facilités… en payant évidemment… alors qu’autrefois l’accès, tout comme celui de l’église, était entièrement gratuit. Certes, de plus, il est hors de question, depuis près de 10 ans, de faire mention de nos remarques sur le sujet, sous peine de réponse aussi ‘sèche’ que brève! Il ne fait pas bon (mais cela l’a-t-il été un jour ?) émettre d’autres opinions que celles des mandarins de la Culture. Et pourtant… oui pourtant… bien des choses sont vérifiables et nous avons décidé de les porter à la connaissance de tous sur notre site. Ajoutons que les détails dont il va être question ici sont connus de tous les ténors en matière de Ste Croix et de ses petites curiosités… Nous notons simplement, dans l’ensemble, ce que nous appellerons une certaine réticence frileuse à exposer et approfondir ces détails. Personnellement, cette tâche est loin de nous gêner en quoi que ce soit, et nous tenions à ce que ceci soit clairement exprimé ici.
Présentation du lieu et de la composition de l’œuvre
Pour nos lecteurs qui ne sont jamais entrés dans le lieu où se trouvent ces vestiges, il est utile de le situer. Il faut entrer dans l’église de Ste Croix, puis le guide vous conduit dans la sacristie qui se trouve derrière le chœur. De là, une porte, à droite, ouvre sur ce local qui fut la chapelle des Pères ou une partie d’une église primitive réservée aux Pères chartreux. Dans ce local, en entrant, les peintures se trouvent légèrement à gauche. Peu de ‘chercheurs’ ont porté leur attention sur l’orientation de cet endroit… tout comme sur celle de l’église actuelle. Pour cette dernière, avec une certaine surprise, nous constatons que l’axe principal se situe pratiquement nord – sud, si l’on veut ergoter un peu plus nous dirons alors : nord est – sud-ouest... De fait, on peut supposer que la chapelle, telle que nous la voyons maintenant, se tient sur le même axe… Mais alors, serait-ce à dire que les Chartreux n’auraient pas fait respecter la déclinaison ‘règlementaire’, est-ouest, pour leur second sanctuaire et sans doute la chapelle primitive? Ce serait incroyable… A moins, bien entendu, qu’ils n’aient pas eu le temps ni les moyens, ni le maître architecte compétent en la matière, pour s’assurer de la bonne direction. En ce cas, il faut admettre aussi que tout au long des travaux, pendant les siècles qui séparent le premier lieu de culte du second, personne ne se soit montré surpris par cette… erreur. Il y a tout de même de quoi rester surpris, et songeur, si l’on admet cette rigueur que tous les ouvrages concernant les Chartreux nous exposent comme la base de leur vie et de leur règle en tout ce qui concerne leurs édifices et intendances. On ne peut pas supposer, comme en d’autres endroits, que cette orientation quelque peu incongrue, et pas très règlementaire, soit le fait du manque de place pour construire l’église, ou une raison défensive imposant cet emplacement. Cette remarque est peu déroutante, car on nous explique doctement que le premier édifice solide et définitif, construit sur le site d’une nouvelle chartreuse, est précisément le sanctuaire. Le reste s’articule depuis ce point éminemment spirituel et sacré, nous le comprenons bien. Il serait logique que les Chartreux apportent à leur lieu de prière toute l’attention voulue et strictement prévue par leur règle, comme en tout autre point du monastère. Faudrait-il alors supposer que ce ‘décalage’, vers le nord, des églises de Ste Croix, ait quelque chose de volontaire et de programmé ?... un peu comme un autre lieu qui nous intéresse encore plus… l’église de Périllos, par exemple ?
Donc, il nous faut dire que les peintures se trouvent orientées dans l’angle nord-est de l’ancienne chapelle. Cette oeuvre est composée, sommairement, de quatre grandes parties distinctes ainsi réparties :
-La crucifixion en haut à droite.
-Le chant des moines pour l’enterrement de Thibaut de Vassalieu en bas à droite.
-L’envol de l’âme de ce dernier sur son lit de mort en bas à gauche.
-La vierge et le christ en haut à gauche.
On imagine facilement que le ‘volet’ de droite, à l’est, comprenne la crucifixion et le chant. Quant à l’autre ‘volet’ de gauche, au nord, il se compose de l’envol de l’âme et de la vierge. Voilà pour la situation.
Ensuite, pour parler des peintures de Ste Croix et de leur thème général ou particulier, il nous semble utile de tenter d’en comprendre les origines et à l’intention ou en l’honneur de qui elles pouvaient avoir été peintes. Le terme de fresque entend « une manière de peindre sur des murs enduits de mortier frais (frais donnera fresque), à l’aide de couleurs délayées à l’eau », nous explique le dictionnaire, édition 1987, de Hachette. Et ce terme fut le premier indiqué depuis leur remise à jour, par les spécialistes, pour ce décor. Cependant, maintenant, il paraîtrait qu’il s’agirait, selon des ‘spécialistes bien plus spécialistes que les spécialistes’, de peintures sur un enduit sec, en vérité. Certes, ce débat est de très haut niveau et pour nous, dans l’absolu, le sexe de l’ange passe, pourtant, après l’ange lui-même.

Pour nous, l’ordre des événements remonte, pour l’instant, à Thibaut de Vassalieu, qui se retrouve directement impliqué dans les deux scènes du ‘volet’ gauche : en bas, celle l’envol de l’âme, et au-dessus, l’arrivée de cette âme (un petit personnage) vers la Vierge et le Christ. Ensuite, sur le ‘volet’ de droite, on retrouve en bas le chant des moines pour la mort de cet homme. Enfin, sous ce ‘chant’, il y avait (encore lisible avant la restauration) une dédicace à son nom. Seule la scène de la crucifixion peut être admise comme ‘hors sujet’ et consacrée à l’adoration du Christ, ce qui semble normal dans une église destinée à la présence des Chartreux. Pourtant, nous verrons plus loin que sans doute quelques détails ont de quoi déranger l’Ordre soigneux que l’on veut nous imposer sans discussion préalable.
Toutefois, avant d’aller plus loin, nous ajouterons que cette représentation est à son époque la plus grande œuvre peinte, pour un seul personnage, de toute la chartreuse de Ste Croix. On peut considérer ceci comme une sorte de privilège, ou comme une reconnaissance très particulière, pour un haut dignitaire impliqué dans l’histoire du monastère. Sans douter une seconde de la valeur de ce personnage politique, de son importance ou encore de sa générosité, il nous faut bien reconnaître que son rôle dans l’histoire… connue et officielle… de cette chartreuse n’est pas vraiment fondamental. Or, habituellement, surtout dans une église chartreuse, les honneurs sont accordés au fondateur de l’Ordre (St Bruno), à Charles Borromée, aux saints patrons et saintes patronnes que l’Ordre vénère particulièrement, ainsi qu’aux personnages étant intervenus dans la fondation ou par des bienveillances très particulières.
Certes, nous voyons que Thibaud teste en faveur des Chartreux. Cependant, cela suffit-il à le situer honorifiquement en tout premier lieu et faire oublier la fondatrice, et première bienfaitrice, de cette nouvelle chartreuse de Ste Croix en Jarez qui, avec ses parents et enfants, répandit tant de biens financiers et avantages sur ce domaine cartusien. Mis à part dans tous les ouvrages sur le sujet, aucun vestige sur le site ne nous parle de cette dernière, sauf le guide lorsqu’on fait appel à son service. Ici, pourtant, le choix d’honorer Béatrix de Roussillon, fondatrice de la chartreuse, aurait été de meilleur ton que celui en faveur de Thibaud de Vassalieu… En ce cas, il nous faut chercher les raisons profondes qui pouvaient motiver une telle décision. Ce qu’on sait sur ce personnage de la fin du 13e siècle peut-il nous apporter plus d’éléments sur cette question ?
Thibaud et… le véritable sanctuaire du recueillement
Celui-ci est pour nous le troisième personnage ‘clé’ de Ste Croix, après Guillaume de Roussillon et son épouse Béatrix de la Tour.
Thibaud aurait eu une importance inversement proportionnelle à la discrétion de sa biographie sur Ste Croix et ses origines. Pour les historiens, Thibaud n'apparaît vraiment qu'avec son testament en faveur des moines...
La famille de Thibaud de Vassalieu serait de haute origine bressane. Sa mère était de la maison de Sure. Après des études importantes couronnées de succès, il accède aux titres de: Archidiacre de l'Eglise Primatiale de Lyon et de Cambrai et Chanoine de Vienne et Die.
Il intervient efficacement dans l'affaire du rattachement du Lyonnais à la France. Philippe le Bel, en 1305, au couronnement du pape Clément, comprend la situation locale et envisage le bénéfice politique et financier d'annexer la province du Lyonnais à la couronne de France. Le roi devait établir déjà en 1293 pour Lyon un « gardiateur » pour veiller à la défense des habitants contre les excès de l'église lyonnaise. En janvier 1306, Thibaud de Vassalieu est choisi comme député du chapitre et de l'évêché de Lyon. Il entame les discussions de l'accord de Pontoise en septembre 1307 avec le chancelier royal. Bonnassieu prétend à cette occasion « que Philippe chercha à le gagner à sa cause et qu'il n'échoua qu'à moitié dans sa tentative... ». Les premières approches n'ayant rien donné de positif, les lyonnais proposent une deuxième démarche. Thibaud à nouveau est délégué pour d'autres engagements diplomatiques qui ont lieu le 7 février 1308 avec Nogaret. Cette fois, les conditions sont acceptables...
La tradition rapporte que Ste Croix était pour lui un sujet de satisfaction intense et de prédilection. Il appréciait de visiter ce lieu aussi souvent qu'il le pouvait. Peut-être avons-nous, ici, l'explication de cette passion pour Ste Croix au travers de ce texte: « ... Ce véritable sanctuaire du recueillement, perdu au milieu d'une épaisse forêt de chênes, dont les derniers représentants ne disparurent qu'à la fin du siècle dernier (Siècle de C. Le Laboureur) avait un charme tout particulier que des souvenirs d'enfance avaient entretenu. La famille De Vassalieu était possessionnée à Ste Croix…» - Texte extrait de ‘Masures de l'Isle Barbe’, C. Le Laboureur-1862 -
Selon ces mots, nous sommes au début du XIVe siècle et, donc, le monastère est fondé depuis à peine vingt ans. En ce cas, comment Thibaud peut-il en avoir des souvenirs d'enfance, et surtout comment sa famille peut-elle y être déjà possessionnée depuis si peu de temps? La seule réponse logique et raisonnable est que sa famille possède là une propriété plus ancienne que la chartreuse… Cette remarque confirmerait, dans l’indifférence générale des ténors en ‘cartusienneries’ diverses, que ce lieu fut occupé, et même solidement et secrètement occupé, comme nous l’avons toujours soupçonné dans nos travaux, depuis 35 ans.
Thibaud, enfant, y a soit été élevé, soit y est venu régulièrement dans le cadre de visites ‘familiales’. Cette éventualité n'est absolument pas incongrue puisque les De Vassalieu sont une très ancienne famille (voir à ce propos un traité de 1151, entre E. Villars et Gerin sénéchal, au sujet du château de Rochetaillée). Dans ces conditions, il est difficile d'envisager une autre explication, et plus encore de douter du texte de C. Le Laboureur. La suite nous confortera dans l'affirmation de ce dernier...
Les preuves de l’existence d’une ancienne chapelle
Revenons sur la lettre de Béatrix adressée à son oncle, prieur de Valvert. Nous y trouvons de nombreux détails, sauf curieusement en ce qui concerne le propriétaire du terrain qui lui doit hommage. Peut-être pouvons-nous supposer qu'ils -Béatrix et Thibaud- se connaissent de toute évidence, bien que l’une soit au déclin de sa vie et l’autre au milieu), et que malgré l'affirmation négative de Béatrix (pieux mensonge que nous avons démonté dans nos travaux), il ne soit pas utile pour la bonne réalisation du projet de faire mention nominativement du propriétaire? N'est-il pas aussi très curieux que dans l'acte de fondation apparaissent tous les protagonistes, sauf... l'ancien propriétaire des lieux. Peut-être est-il encore assez connu pour ne pas apparaître sur le document? Ce ne serait que suppositions gratuites et non fondées… si le texte suivant n'existait pas: « ... Dans cette affection des plus naturelles le désir qu'on voulût bien confier ses dépouilles mortelles à la Chartreuse de Ste Croix hantait sa pensée. Son testament daté du 23 mai 1327 exprime parfaitement cette intention et le lieu de sa sépulture y est même fixé: ante hostium capelle antique, dicti poci. Cette expression peut surprendre, quand on songe que cette Chartreuse était de fondation récente et qu'elle datait de cinquante ans à peine... » -‘Découvertes dans l'ancienne chapelle de la Chartreuse de Ste Croix’ -1898- MX. Favarcq.
Ceci peut expliquer cela! Thibaud est probablement bien placé pour connaître l'existence d'une ancienne chapelle sur ce site de Ste Croix et demander à être enseveli devant l'entrée de celle-ci. Rien ne prouve qu'un tel édifice n'ait jamais existé et Thibaud maîtrisant avec aisance l'écriture comme prolongement de sa pensée... comment supposer qu'il se soit trompé sur les termes de « capelle antique »? D'autre part la chapelle des Pères, si elle fut construite au début du chantier de Ste Croix, ne pouvait raisonnablement pas être entièrement achevée dans l'année, c’est impossible. Dans ce cas, 45 ans ne peuvent pas justifier le terme « antique »...
Les privilèges discrets de T. de Vassalieu
Ce testament est une pièce très précieuse sur les conditions de vie de Thibaud et sur ce qu'il lègue. A. Vachez nous fournit quelques précisions sur le partage de sa succession entre l'église de Lyon, Guillaume de Vassalieu et Guillaume de Sure, ces deux derniers étant désignés comme ses exécuteurs testamentaires. A. Vachez précise que les Chartreux accédèrent aux ultimes volontés du défunt du fait que celui-ci s'était montré très généreux à leur égard: somme d'argent élevée (300 livres viennoises) pour la nourriture des religieux et des pains blancs les lundi et vendredi, pour le repos de son âme et de celles de ses parents, des propriétés à St Genis Laval, St Andéol et enfin 15 gros tournois par Chartreux... Il lègue également d’importants ouvrages ‘de bibliothèque’ que nous verrons par ailleurs. Puis, toujours à Ste Croix, il donne tout le mobilier qu'il y possède: objets de literie, de repas et affectés au service de la table. A. Vachez précise encore que Thibaud n'oublie ni son écuyer, ni son médecin, un certain Pont, moine de St Romain le Puy... Cependant, nous ajouterons quelques détails qui échappent curieusement à A. Vachez, tels que des instruments de recherches chimiques et... son alambic, aussi légués à Ste Croix... Thibaud se serait-il adonné à quelques expériences alchimiques ?
Thibaud cessant ses activités fin de l'année 1324, il termine probablement sa vie dans le monastère avec tout son mobilier et son matériel personnel...
L'importance de ce personnage eut plus d'ampleur que l'on pourrait le supposer, et les Chartreux ne s'y sont pas trompés. A ce propos, il y eut tout au long de l'histoire de la chartreuse de Ste Croix de nombreux bienfaiteurs et généreux donateurs. Pourtant, les Pères n'accepteront dans le périmètre de la chartreuse, mais pas forcément dans le cloître, que deux personnes seulement y finissent leurs jours: Béatrix de la Tour et Thibaud de Vassalieu. Mais encore ces deux personnages eurent-ils aussi le droit d'être ensevelis dans l'église des Pères... Pourtant un seul, pas forcément le plus important, visiblement, aura l'ultime privilège que sa mise au tombeau soit, par la peinture, liée à la mémoire de Ste Croix dans l'église des Pères: Thibaud de Vassalieu...
Chronologie d’une formidable découverte culturelle
- Thibaud de Vassalieu, mort en 1327, est donc enseveli à Ste Croix.
On peut, par le fait qu’il est impossible qu’elles aient été réalisées avant cette date, sans grand risque estimer ces peintures du milieu du XIVème siècle. N. Rondot les qualifie de « plus anciennes que notre région possède »...
- Le Père Ménestrier rappelle l’épitaphe du tombeau de T. de Vassalieu, transmise par la tradition, dans l’histoire de l’église de Lyon. Elle fut réutilisée sans modification par Pierre Gras, en 1868, et Péricaud.
- 1696. Probablement les Pères chartreux, transformant le choeur de l’ancienne église en salle capitulaire, font badigeonner les peintures. Ils conservent, tout de même, le souvenir de Thibaud de Vassalieu en gravant un texte de rappel sur une dalle résumant les faits et dates.
A.Vachez relate que, visitant Ste Croix en juin 1897, le curé lui montre, dans une des chapelles construites en 1842, un morceau de la « pierre tombale » que le Père Ménestrier avait vu en entier dans l’ancienne salle capitulaire: « HIC JACET VENERABILIS THEUBALDUS DE VERSALIACO QUONDAM LUGDUNENSIS ET CAMERACENSIS ARCHIDIACONUS,VIENNENSIQUE ET DIENSIS CANONICUS, QUI OBIIT IV NONAS JUNII, ANNO M.CCC.XXVH. »
- T. Ogier relate une visite de l’ancienne église avant la démolition de sa toiture: « ... l’ancienne église, dont on voit encore une partie digne d’intérêt ; le choeur à fenêtres et roses gothiques du XlVème S., le plafond est couvert d’assez belles peintures à grand effet, figures et rinceaux, on y voit les emblèmes des quatre évangélistes et l’agneau de dieu portant sa croix. Sous le pavé reposent les restes des deux Béatrix de Roussillon. Il est vivement à regretter que la fabrique ne puisse pas faire les frais nécessaires pour soutenir ce beau reste prêt à périr. »
- 1842. Agrandissement de l’église par la construction de deux chapelles latérales... La pierre du XVIIème S. de l’épitaphe de T. de Vassalieu est cassée et les morceaux utilisés pour rattraper la différence de sol entre la chapelle et la nef... le texte du morceau utilisé pour la chapelle de gauche est: « ANNO MCCC XXVII ».
- Novembre 1862. La voûte à nervures de l’ancien choeur commence à s’effondrer. La paroisse, trop pauvre pour financer les restaurations nécessaires, décide d’abattre la toiture...
-3 août 1896. Ce jour-là, une célèbre société archéologique de Montbrison, « La Diana », prépare sur site leur prochaine visite de Ste Croix. Ce local, qui attire la curiosité du groupe d’érudits, n’est plus qu’une remise très encombrée. La découverte se fera ensuite de façon fortuite : « …le 5 août 1896, au cours de l’excursion annuelle de la Diana, des membres de notre société grattèrent le mur -avec un parapluie dit-on- et mirent à jour une inscription… » (C.R. du vicomte Maurice de Meaux, Bulletin de la Diana – tome XLVII – n°2 – p. 41-1981). ... Quelques traces de peintures, encore visibles en hauteur, les intriguent. Les badigeons laissent effectivement deviner par endroit quelques lettres gothiques... Quelques jours plus tard, M. Favarcq enlève l’enduit qui recouvre la totalité du décor contenu sur les deux murs formant l’angle nord-est de l’ancienne église des Pères.
Une grande découverte vient d’avoir lieu. Un peu plus tard, l’ensemble des peintures murales de l’ancienne chapelle des Pères chartreux de Ste Croix échappait à l’oubli en ressurgissant du passé…

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